Loi Rilhac adoptée au Sénat : les écoles n’ont pas besoin d’une nouvelle strate hiérarchique, mais de collectif et de solidarité

Après plusieurs décennies de réformes libérales délétères et dévastatrices pour l’école, la loi Rilhac « créant la fonction de directrice ou de directeur d’école » adoptée ce mercredi 10 mars au Sénat remet sur la table la question du statut de supérieur·e hiérarchique en dotant les directeurs·trices d’école d’une autorité fonctionnelle qui leur donne « une délégation de compétences de l’autorité académique » , piétinant ainsi le rôle et le fonctionnement collégial du conseil des maîtres·ses, l’auto-organisation des équipes et la liberté pédagogique. La proposition de loi sera soumise dans les prochaines semaines à une seconde lecture à l’Assemblée Nationale.

 

Petite histoire d’un projet de loi dont personne ne veut

Depuis des décennies, les gouvernements successifs tentent de restructurer l’école primaire. Leur sens est toujours le même : celui d’une rationalisation des moyens et d’une accentuation du pouvoir hiérarchique. Le gouvernement actuel ne fait pas exception à cette règle et le ministre Blanquer est particulièrement offensif dans ce domaine.

-12 novembre 2018 : annonces du ministre sur LCI. Jean-Michel Blanquer annonce qu’il présentera une “loi pour un changement du statut du directeur d’école”.
24 juin 2020 : loi créant la fonction de direction d’école
L’Assemblée nationale adopte en première lecture le projet de loi Rilhac. Cette loi introduit un grade fonctionnel de directeur·trice d’école. L’article 1 de cette loi prévoit, par exemple, un droit de véto du directeur ou de la directrice sur les décisions du conseil d’école. Néanmoins, la loi est vidée de son contenu et la députée Cécile Rilhac (LREM) doit renoncer à créer un corps de directeurs et directrices d’école. Un certain nombre de dispositions sont renvoyées à des décrets ultérieurs : en particulier la délégation de compétences des inspecteurs·trices vers les directeurs·trices d’école .
-27 août 2020 : circulaire “direction d’école”
Le ministère annonce l’augmentation de décharge de direction de deux jours pour les écoles de 1 à 3 classes et pour celles de 9 à 13 classes. La mesure de pérennisation de la prime annuelle de direction d’école qui serait de 450 euros bruts est également prévue. Par contre, toujours rien de prévu concernant les préoccupations centrales des personnels, l’allègement de leurs missions et le recentrage sur leur cœur de métier : la pédagogie.
-10 mars 2021 : réintroduction de l’autorité fonctionnelle
Le Sénat adopte en première lecture le projet de loi Rilhac en le modifiant. Les directeurs·trices d’école se voient ainsi doté·es d’une autorité fonctionnelle et d’une délégation de compétences de l’autorité académique mettant fin à plusieurs décennies de gestion collégiale de l’école.

 

Direction d’école : plus de démocratie, plus de coopération

Les directrices et directeurs d’école se trouvent de plus en plus isolé·es et en surcharge de travail avec une avalanche de tâches à effectuer (relation avec les parents, coordination, demandes institutionnelles, …), devant faire preuve d’une grande polyvalence. De plus la direction d’une école est souvent obscure pour un grand nombre de collègues n’ayant pas réellement connaissance des tâches qui incombent aux directeurs et directrices d’école. Cette séparation entre l’équipe enseignante et la direction peut créer une certaine défiance et/ou des tensions.

 

SUD éducation revendique d’autres organisations, qui iraient dans le sens d’une meilleure coopération au sein des équipes et, parconséquent,d’une réelle appropriation par chaque enseignant∙e du projet de son école.

Quelques exemples :

La co-direction : Il s’agirait d’une direction gérée par deux collègues. Les tâches et le temps de décharge seraient donc divisés en deux.
La direction alternée : Il s’agirait d’une direction qui changerait tous les ans. Un·e collègue prendrait la direction de l’école et les tâches qui lui incomberaient pendant une année. Elle ou il serait choisi·e par le conseil des maître·sses.
La direction collégiale : Il s’agirait d’une direction gérée par toute ou une grande partie de l’équipe enseignante. Chacun·e aurait une ou plusieurs tâches à sa charge et un temps de décharge prévu en fonction de celles­-ci.

NOS REVENDICATIONS
Pour une école égalitaire, émancipatrice et autogérée, SUD éducation revendique : une gestion coopérative de la direction d’école ; l’augmentation du temps de concertation sur temps scolaire et des temps de décharge ; une formation initiale et continue plus importante ; l’abandon du projet de loi Rilhac ; un plan d’urgence pour les écoles du Morbihan, notamment en matière de moyens et de remplacements.